Comme il a été annoncé, les partisans du candidat Marc Ravalomanana ont investi le parvis de l'hôtel de ville d'Antananarivo samedi 29 janvier, pour manifester sur ce qu'ils qualifient de fraudes massives commises lors du deuxième tour de l'élection présidentielle.


Évidemment, le candidat en personne a omis de venir sur les lieux. Mais la foule a pu vociférer toute sa hargne, chauffée à blanc par des animateurs qui se sont succédé au micro pour égrener des "preuves" et "témoignages" de cette soi-disant "fraude du siècle".


Cette manifestation sur la voie publique étonne, dans la mesure où, dans son article 7, le Code électoral est clair : seule la Haute Cour Constitutionnelle est habilitée à juger et à statuer sur tout contentieux électoral. Et, à ce propos, le délai de deux jours pour la transmission des requêtes à ladite cour a été même repoussé à ce lundi 31 janvier, parce qu'il est cette fois-ci tombé un samedi.


Devant cette initiative pour le moins insolite et un tantinet inquiétante de Marc Ravalomanana et ses partisans, les questions fusent. Pourquoi un ancien président de la République s'abaisse-t-il à de telles extrémités? Pourquoi mettre la pression sur la plus haute juridiction du pays, et ne pas lui faire simplement confiance en y déposant les fameuses requêtes et attendre ensuite sereinement les décisions des hauts magistrats?


Perturber la vie publique et risquer de provoquer des troubles en excitant la populace n'est pas une initiative très classe, assurément indigne d'un authentique ancien chef de l'État, même si son accession par deux fois à la magistrature suprême n'a pas fait l'unanimité aussi bien en 2002 (refus d'aller au deuxième tour et double auto-proclamation) qu'en 2006, (fortes suspicions de fraudes).


Qu'espère l'ancien dictateur entrainé dans cette aventure par plusieurs de ceux qu'il a jeté par le passé en prison ou qui ont participé à précipiter sa chute ? Cette fuite en avant a-t-elle des motifs crédibles? Comment croire qu'un écart de plus de 520.000 voix puisse avoir été obtenu par des manœuvres frauduleuses, alors que tous les observateurs internationaux attestent du caractère démocratique de l'élection?


La population elle-même ainsi que la société civile ne semblent guère s'alarmer sur ces prétendues falsifications commises à l'échelle de toute une nation, avec de supposées complicités de la quasi-totalité des autorités responsables du scrutin et de pratiquement tout le monde !
Seuls le candidat pressenti vaincu et ses fans fulminent sur les ondes et publient des propos incendiaires dans leurs médias à propos de cette prétendue fraude à grande échelle. Des agissements de mauvais perdants qui ne les honorent guère, en somme.


Bernard Saraléa.